collecte section Bourgogne

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les borrélia

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3. Bactériologie

Toutes les Borrelia ont une morphologie pratiquement identique et sont indifférentiables même en microscopie électronique.
En microscopie optique, les Borrelia se présentent comme des éléments filiformes, spiralés, aisément colorables par le Fontana-Tribondeau ou le Giemsa. Ce sont des bactéries extracellulaires de 8 à 30 µm de long sur 0,2 à 0,5 µm d’épaisseur, avec une morphologie hélicoïdale comportant 5 à 10 spires irrégulièrement enroulées, mobiles, associant des mouvements de flexion, de rotation et de translation, grâce à un appareil locomoteur entre la membrane cytoplasmique et la membrane externe.
La microscopie électronique a permis d’en préciser la structure et de différencier les Borrelia des autres spirochètes
La classification des Borrrlia était auparavant basée sur les vecteurs (spécificité de l’association à un vecteur) ou sur la pathogénicité pour l’homme et les animaux de laboratoire. Actuellement, la classification est phylogénique grâce aux études des séquences des gènes codant pour l’acide ribonucleique 16S sRNA et la flagelline (protéine associée aux flagelles).
Ces études ont permis de séparer :
- les Borrelia du complexe B. burgdorferi, transmises par des tiques dures du genre Ixodes, responsables de la Maladie de Lyme,
- les Borrelia, transmises par des tiques molles, du genre Ornithodorus, responsables de fièvres récurrentes.

4.       Physiopathologie 

L’aspect récurrent est le caractère clinique le plus évident des fièvres récurrentes. Il correspond non pas à l’infection par des souches différentes de Borrelia, mais à leur variation antigénique.
Les Borrelia détectées chez les malades différent de la souche infectante initiale, comme différent les Borrelia des différentes récurrences. Les populations de chaque récurrence sont appelées sérotypes. Le sérotypage est effectué par des anticorps monoclonaux obtenus de patients ou d’animaux infectés.
Les antigènes variables déterminant les différents sérotypes des fièvres récurrentes sont des lipoprotéines membranaires de la membrane externe des Borrelia, variable membrane proteins ou vmp, divisées en 2 groupes : variable small protein (vsp) et variable large protein (vlp). Elles ont été particulièrement étudiées chez B. hermsii.
Sous l’action des anticorps dirigés contre les vmp, les Borrelia disparaissent rapidement du sang. Cependant, quelques jours plus tard, une nouvelle population de Borrelia réapparaît dans le sang porteuse d’une protéine de membrane vmp antigénétiquent différente de celle exprimée lors du premier accès. Cette variation antigénique est multiphasique et explique les rechutes successives.
Les manifestations cliniques sont moins sévères chez les patients en contact régulier avec une souche que chez les nouveaux venus dans la zone. Ainsi, des populations avaient l’habitude de se déplacer avec «leurs tiques» pour préserver leur immunité. La vlp semble être la cible de la réponse immunitaire.

5.       Symptomatologie

Bien que les mêmes symptômes et les mêmes complications se retrouvent dans chaque FR, leur fréquence et leur gravité varient d’un foyer à l’autre.

5.1. Description de la forme «classique » :

Après une incubation silencieuse de 3 à 20 jours (moyenne : 7 jours), la maladie débute par un frisson suivi d’une brusque poussée fébrile à 40°C et au-delà. Des céphalées intenses, des myalgies, des arthralgies, des douleurs abdominales sont habituelles, accompagnées d’anorexie, de nausées, de vomissements. Le malade est hébété, sans tuphos, parfois agité. Un rash maculo-papuleux ou pétéchial peut survenir.
A l’examen, on note une langue saburrale, facilement tirée, des conjonctives ictériques ou subictériques, une hépatosplénomégalie sensible.
Après une période de fièvre de quelques jours (1 à 14 jours, 3 jours en moyenne), l’accès se termine par une chute thermique rapide, des crises urinaire et sudorale et une chute tensionnelle.
Suit une période d’apyrexie de 5 à 14 jours (moyenne : 7 jours, extrême : 1 à 63 jours) au cours de laquelle le patient continue à se sentir mal.
En l’absence de traitement, plusieurs récurrences surviennent (1 à 18). La maladie a tendance à perdre sa virulence au cours des récurrences, mais ce n’est pas une règle absolue.
Pendant les accès peuvent survenir des complications :
- hémorragiques : pétéchies et épistaxis, parfois hémorragies d’organes (cerveau, méninges, rétine, rate)
- hépatiques : ictère en règle discret, anomalies biochimiques habituelles
- neurologiques : méningite lymphocytaire aiguë, méningo-encéphalite, myélite, hémiplégie, paralysie des nerfs crâniens (paralysie faciale de type périphérique, paralysies oculomotrices). La paralysie faciale est le signe le plus fréquent chez l'enfant.
- psychiatriques : agitation, prostration, hallucinations, état dépressif ;
- pulmonaires : toux, pneumonie, œdème pulmonaire
- cardio-vasculaires : anomalies ECG (allongement de l’espace QT, extrasystoles ventriculaires), collapsus au moment de la chute thermique, myocardite ;
- oculaires : uvéite, iridocyclite, hémorragies rétiniennes, névrite rétro-bulbaire.
Le taux de mortalité varie de 2 à 5%. Il est élevé surtout chez les enfants et les femmes enceintes.  Les décès surviennent par collapsus cardio-vasculaire, insuffisance hépatique grave, hémorragies, lors de la défervescence thermique ou dans les suites d'un traitement antibiotique (réaction de Jarish-Herxheimer) ou par complications obstétricales.

5.2. Fièvres récurrentes chez la femme enceinte. Les complications obstétricales sont en effet fréquentes et graves : risque élevé d’avortements et d’accouchements prématurés, complications maternelles, infection congénitale avec pronostic réservé pour le nouveau-né.

5.3. Formes cliniques selon la Borrelia en cause.

5.3.1. Dans la FR à Borrelia recurrentis, le nombre de récurrences est limité à 1 ou 2. La mortalité  spontanée est de 40%, traitée proche de 5%. Des rechutes après traitement sont observées dans environ 2% des cas.
5.3.2. Dans les FR à tiques, il y a un grand nombre de récurrences.
La FR à B. duttoni a une incidence annuelle en Tanzanie de 384/1000 chez les enfants de moins de 1 an et de 163/1000 chez les enfants de moins de 5 ans. La mortalité est élevée, elle a le plus mauvais pronostic.
La FR à B. crocidurae est en règle bénigne, d’évolution spontanément favorable Les formes inapparentes sont fréquentes. Son incidence en Afrique de l'ouest est de 11/100 personnes/an. Au Togo, sur 244 patients fébriles, la PCR a été positive pour B.crocidurae ou B. duttoni dans 10% des cas.

5.4. Les formes associées. Les FR peuvent être associées à une fièvre typhoïde et surtout au paludisme, la co-infection paludisme-fièvre récurrente étant fréquente en zone d’endémie palustre.

6. Diagnostic

La clinique étant non spécifique, le diagnostic sera souvent une découverte de laboratoire lors de l’examen d’une numération-formule sanguine, d’un frottis ou d’une goutte épaisse demandés pour le diagnostic de paludisme.
La possibilité d’une FR doit être évoquée devant  une anamnèse d’épisodes fébriles antérieurs, un ictère, des signes hémorragiques, une éruption cutanée, une méningo-encéphalite, une hépato-splénomagélie, plus ou moins associés.
Le diagnostic différentiel est vaste et englobe paludisme, fièvre typhoïde, arboviroses (dengue, fièvre jaune), rickettsioses, leptospiroses, septicémies, méningites, …

6.1. Diagnostic biologique non spécifique. Les examens biologiques non spécifiques n’apportent pas d’élément positif au diagnostic. On retient : thrombopénie, hématurie, protéinurie.

6.2. Diagnostic biologique spécifique 

6.2.1. Il est basé sur l’examen microscopique du frottis sanguin ou de la goutte épaisse colorés au Giemsa ou au May Grunwald Giemsa, examen  à répéter ce qui augmente les chances de positivité. Le seuil de positivité de la goutte épaisse est de 106 spirochètes/ml, le seuil de positivité du frottis sanguin est de 105 spirochètes/ml.
Il faut une étude minutieuse et patiente, car il y a en général peu de Borrelia dans les FR à tiques. La sensibilité de l’examen peut être augmentée en utilisant des techniques de fluorescence. Le QBCâ, technique de détection rapide (10 mn), simple, associe la coloration par l’acridine-orange à la centrifugation permettant de séparer les différents constituants du sang. Le QBCâ est très utile, permettant de déceler des bactériémies souvent faibles. Les Borrelia apparaissent comme de fins filaments fluorescents mobiles avec 8 à 10 spirales régulières. L’observation, immédiatement après la centrifugation, les localise à l’interface de la strate leucoplaquettaire et du plasma. Plus tard, ils migrent dans le plasma. Le seuil de positivité est de 103 spirochètes/ml, donc plus sensible que la goutte épaisse ou le frottis sanguin dans le diagnostic des borrélioses.
Frottis ou goutte épaisse et QBC sont les éléments de diagnostic positif utilisés en zones tropicales. Les méthodes diagnostiques suivantes nécessitent des laboratoires spécialisés.

6.2.2. Cultures de Borrelia
Limitées aux cultures in vivo par inoculation intrapéritonéale à la souris immature, elles sont actuellement réalisées in vitro pour certaines Borrelia sur milieu de Kelly modifié (MKM) ou milieu Barbour, Stoenner, Kelly II (BSK II). La culture est incubée à 33°C et examinée chaque jour à la recherche de spirochètes. La culture est déclarée négative au bout de 4 semaines.

6.2.3. Sérologie. Différentes techniques sont utilisées : immunofluorescence, ELISA, Western-Blot jusqu’ici peu performantes à la différence de la sérologie de la Maladie de Lyme. La sérologie GlpQ permet actuellement de différencier les  FR et Maladie de Lyme.

6.2.4. Amplification génique. La longueur des délais des cultures, la performance limitée de la sérologie font tout l’intérêt de l’amplification génique (PCR). Les techniques de biologie moléculaire permettent une identification des espèces par l’étude comparative des séquences de gènes codant pour l’ARN 16S (gène rrs) ou la flabelline.

7. Traitement

7.1. Il est base sur l’antibiothérapie : les antibiotiques utilisés sont les cyclines, le chloramphénicol, la pénicilline, l’érythromycine.
Les traitements sont actuellement prescrits en dose unique : doxycycline 200 mg, minocycline 200 mg, tétracycline 500 mg per os ou 250 mg IV.
Chez les femmes enceintes et les enfants de moins de 8 ans : érythromycine 500 mg per os, pénicilline procaïne 1 000 000 unités IM, chloramphénicol 500 mg per os ou IV.
Dans les formes neurologiques, la fréquence des rechutes avec un traitement par dose unique (20%) nécessite un traitement prolongé par la pénicilline G  ou les C3G pendant au moins 14 jours.
7.2. Risque de réaction de Jarish-Herxheimer (R-JH)
La R-JH est surtout fréquente dans la FR à poux (jusqu’à 80%), plus rare dans les FR à tiques, sauf à B. duttoni (jusqu’à 60%). En fait, des études faites aux USA montre la fréquence de la R-JH dans les FRT : 54% avec B. hermsii.
La R-JH est caractérisée par l’exacerbation brutale des signes 1 à 2 heures après la prise de médicaments. Elle est marquée au début par des frissons durant 10 à 30 mn, avec  tachycardie, tachypnée, hypotension artérielle, puis, à la fin des frissons, par une poussée fébrile à 40°C. La chute de la température s’accompagne de sueurs et d’une chute de la tension artérielle.
La physiopathologie de la R-JH est mal connue et le traitement mal codifié. Les corticoïdes n’ont pas d’action.
La mortalité est élevée : 5% dans la R-JH de la FR à B. recurrentis.

8.Prévention

Dans la FR à poux : lutte contre les poux.
Dans les FR à tiques : prévention contre les piqûres de tiques :
-  tiques domestiques : amélioration de l’habitat, pulvérisations intradomiciliaires ;
- tiques nidicoles : éviter les contacts «accidentels» avec les tiques au cours de camping, safaris, randonnées ; porter des vêtements longs, utiliser des repellents (DEET sur la peau, perméthrine sur les vêtements) et des moustiquaires, mettre les pieds des lits, situés à distance des parois des maisons, dans des récipients contenant une solution acaricide.

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