Mardi 20 décembre 2011
Les difficultés diagnostiques face à une suspicion de maladie de Lyme conduisent parfois à demander une sérologie, dont la sensibilité reste variable. Sa place n’est pas justifiée au stade primaire de la maladie, celui d’érythème migrant.
Piqûre de tique
La maladie de Lyme, due à Borrelia burgdorferi, est transmise par piqûre de tique, qui passe souvent inaperçue, d’autant que les larves et les lymphes de ces arthropodes peuvent être infestantes. La réduction de la pratique de la chasse qui a conduit à une prolifération du gibier, associée à l’augmentation de la pratique des loisirs de plein air sont à l’origine d’un accroissement de l’exposition de la population. On estime aujourd’hui l’incidence à 10/100 000 en France, certaines régions, comme l’Alsace où l’incidence est de 86/100 000, étant plus particulièrement concernées.
Pas de sérologie au stade primaire
Au cours de la phase primaire, le diagnostic est uniquement clinique : un érythème migrant au lieu de la piqûre est présent dans 70 à 80 % des cas. Il s’agit d’une lésion unique érythémateuse, survenant après une phase d’incubation de 3 à 32 jours, d’évolution centrifuge avec éclaircissement central très caractéristique. Le diamètre varie de 5 à 68 cm, avec une médiane de 15 cm, mais de véritables érythèmes migrants de taille inférieure à 5 cm sont possibles et alors bien souvent non diagnostiqués.
Au stade primaire, la recommandation consensuelle est de ne pas faire de sérologie, dont la négativité (80 % des cas) risquerait d’écarter faussement le diagnostic. En revanche, tout patient ayant une lésion évocatrice d’un érythème migrant doit bénéficier d’une antibiothérapie adaptée pour une durée de 14 à 21 jours et ce, même si la piqûre de tique est passée inaperçue. Il est essentiel de bien respecter la posologie (dose et durée) des antibiotiques, dont les deux principaux sont l’amoxicilline à raison de 3 g/jour et la doxycycline (200 mg/jour).
Chez un patient rapportant une histoire de piqûre de tique sans lésion cutanée, l’antibiothérapie n’est pas systématique, mais est par exemple indiquée chez la femme enceinte.
Phases ultérieures
De nombreux cas d’érythème migrant ne sont pas reconnus comme tels, ou sont insuffisamment traités (antibiothérapie trop courte ou à dose trop faible) et la maladie évolue alors vers le stade secondaire, où tous les organes peuvent être touchés, ce qui donne lieu à une grande variabilité d’expression clinique, puis tertiaire. Deux types de symptômes sont pathognomoniques de la maladie : le lymphocytome cutané bénin, lésion infiltrée inflammatoire généralement localisée au niveau du lobe de l’oreille, dont l’histologie est celle d’un lymphome. Et l’acrodermatite chronique atrophiante, vieillissement cutané prématuré le plus souvent au niveau des membres inférieurs, qui se rencontre fréquemment chez les sujets âgés.
En dehors de ces lésions pathognomoniques, le diagnostic est souvent difficile à faire à ces stades. En pratique, toute symptomatologie cutanée, oculaire, neurologique, psychiatrique, musculaire, cardiaque, osseuse… en l’absence de diagnostic précis, doit conduire à prescrire une sérologie de la maladie de Lyme, qui elle-même pose le problème de sa sensibilité.
En pratique
La recommandation officielle est de faire une sérologie en ELISA, IgM et IgG sans autre analyse en cas de négativité. En cas de positivité, le test doit alors être confirmé par un Western blot.
Le problème est que plusieurs études soulignent le manque de sensibilité des tests ELISA, qui varie de 37 à 70 %. En effet, l’impossibilité d’étalonner ces tests chez les patients conduit à réaliser l’étalonnage sur des sujets sains (donneurs de sang), la valeur seuil choisie visant à ne pas dépasser 5 % de séropositivité dans une région donnée. De ce fait, le seuil de positivité est arbitraire et varie d’une ville à une autre. Et c’est pour cette raison que sont régulièrement rapportés d’authentiques cas de maladie de Lyme (prouvés par culture de la bactérie) à sérologie négative.
Ceci a conduit les experts européens à recommander d’inclure dans les critères diagnostiques, en cas de forte suspicion de neuro-borréliose, la réponse à un traitement antibiotique d’épreuve.
Aux stades secondaires et tertiaires, l’antibiothérapie est prescrite pour une longue durée
› Dr ISABELLE HOPPENOT
Entretiens de Bichat. D’après la communication du Dr Christian Perronne, hôpital universitaire Raymond-Poincaré, Garches.
Le Quotidien du Médecin du 12/12/2011