Borréliose de Lyme : situation générale et conséquences de l’introduction en Île-de-France d’un nouvel hôte, le tamia de Sibérie
Lyme borreliosis: general situation and consequences of the introduction of a new host in Ile-de-France, the Siberian chipmunk |
Jean-Louis
Chapuis (chapuis@mnhn.fr)1, Elisabeth Ferquel2, Olivier Patey3,Gwenaël Vourc’h4, Muriel Cornet2
1/ Muséum national d’histoire naturelle, Paris, France 2/ Centre national de référence des Borrelia, Institut Pasteur, Paris, France 3/ Centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint–Georges, France 4/ Institut national de la recherche agronomique, Saint-Genès-Champanelle, France |
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Résumé
L’épidémiologie de la borréliose de Lyme demeure encore peu connue en France, les données étant très parcellaires. Les études d’incidence ont montré une grande disparité entre les régions, avec des niveaux de risque élevés en Alsace, Lorraine, Limousin, Auvergne et Rhône-Alpes. Les études vectorielles associées montrent des corrélations entre incidences et densités en nymphes infectées, mais les exceptions sont fréquentes. Dans des forêts d’Île-de-France et de Picardie, l’introduction du tamia de Sibérie pourrait intervenir dans la dynamique de la borréliose de Lyme. Cet écureuil semble en effet être réservoir de cette maladie, il porte de fortes charges en Ixodes ricinus et, de plus, il montre une tolérance accrue vis à vis des espèces de Borrelia, comparativement aux autres réservoirs. Les recherches en cours visent à préciser le rôle de cet écureuil exotique dans l’incidence de cette maladie en périphérie de la Forêt de Sénart (Essonne) où la population de tamias est estimée entre 10 000 et 20 000 individus. |
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Abstract
The epidemiology of Lyme disease is still poorly known in France, and available data are patchy. Incidence studies have shown a great disparity between regions, the highest risk being located in Alsace, Lorraine, Limousin, Auvergne, and Rhône-Alpes. However, a positive correlation is generally found between densities of infected nymphs and human incidence, but some exceptions remain. In several forests of the Ile-de-France and Picardie regions, the introduction of the Siberian chipmunk could intervene in the Lyme borreliosis dynamic. This ground squirrel seems to be a reservoir for the disease; it carries heavy loads of Ixodes ricinus, and harbours a greater diversity of Borrelia species than the other native reservoirs. Ongoing research aims at clarifying the role of this exotic squirrel in the incidence of this disease around the Forêt de Sénart, where the population of chipmunks is estimated to range between 10,000 and 20,000 individuals. |
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Mots
clés / Key words
Borréliose de Lyme, France, zoonose, vecteur, incidence, densité de tiques infectées, introduction, Tamias sibiricus, réservoir / Lyme borreliosis, France, zoonosis, vector, incidence, density of infected ticks, introduction, Tamias sibiricus, reservoir host |
Borréliose de Lyme : situation générale et
conséquences de l’introduction en Île-de-France d’un nouvel hôte, le tamia de Sibérie
J-L.
Chapuis, E. Ferquel, O. Patey, G. Vourc’h, M. CornetBEH, Bulletin
Epidémiologique Hebdomadaire, 2010, N° hors -série, 14 septembre,
pp.6-8. Bibliographie.
la borréliose de Lyme (BL) est la
zoonose vectorielle la plus répandue dans les pays tempérés d’Amérique du Nord, d’Europe et d’Asie. En France, elle est transportée par la tique Ixodes
ricinus qui parasite un grand nombre d’hôtes dont certains sont réservoirs de Borrelia.
L’épidémiologie de la BL demeure encore peu connue en France, les données étant très parcellaires.
Les études d’incidence ont montré une grande disparité entre les régions avec des niveaux de risque élevé en Alsace, Lorraine et Rhône-Alpes et des variations locales au sein d’une même région, très importantes.
Au début des années 2010, l’augmentation du nombre de cas de BL dans un périmètre proche de la forêt de Sénart (Essonne, Île-de-France) a conduit à s’interroger sur la responsabilité de l’introduction du tamia de Sibérie en France. Cet écureuil de Corée a été importé en tant que nouvel animal de compagnie (NAC) et vendu dans les animaleries depuis la fin des années 1960 en Europe. Généralement relâché dans la nature par des propriétaires lassés de sa compagnie, ce tamia constitue actuellement 22 populations installées en Europe dont 11 en France, dans les régions Île-de-France et Picardie. La population de la forêt de Senart compte entre 10 000 et 20 000 individus de cette espèce. Il apparaît que cet écureuil est à la fois plus infecté par les tiques et plus infecté par B. Burgdoferi que les rongeurs autochtones. Il pourrait augmenter le risque de transmission de BL à l’homme.
Si cette présomption n’est pas pour l’instant confirmée, il convient néanmoins de prendre différentes mesures visant à limiter l’installation de nouvelles populations de tamias en France, à savoir l’interdiction de la commercialisation de ce NAC dans les animaleries et le contrôle de la vente ou des échanges via Internet.
L’épidémiologie de la BL demeure encore peu connue en France, les données étant très parcellaires.
Les études d’incidence ont montré une grande disparité entre les régions avec des niveaux de risque élevé en Alsace, Lorraine et Rhône-Alpes et des variations locales au sein d’une même région, très importantes.
Au début des années 2010, l’augmentation du nombre de cas de BL dans un périmètre proche de la forêt de Sénart (Essonne, Île-de-France) a conduit à s’interroger sur la responsabilité de l’introduction du tamia de Sibérie en France. Cet écureuil de Corée a été importé en tant que nouvel animal de compagnie (NAC) et vendu dans les animaleries depuis la fin des années 1960 en Europe. Généralement relâché dans la nature par des propriétaires lassés de sa compagnie, ce tamia constitue actuellement 22 populations installées en Europe dont 11 en France, dans les régions Île-de-France et Picardie. La population de la forêt de Senart compte entre 10 000 et 20 000 individus de cette espèce. Il apparaît que cet écureuil est à la fois plus infecté par les tiques et plus infecté par B. Burgdoferi que les rongeurs autochtones. Il pourrait augmenter le risque de transmission de BL à l’homme.
Si cette présomption n’est pas pour l’instant confirmée, il convient néanmoins de prendre différentes mesures visant à limiter l’installation de nouvelles populations de tamias en France, à savoir l’interdiction de la commercialisation de ce NAC dans les animaleries et le contrôle de la vente ou des échanges via Internet.
(publié le 9 novembre 2010
Ecureuil de Corée, vigilance!
Peut-être
l’avez-vous déjà rencontré en vous promenant dans les bois et peut-être
comme moi, vous êtes vous demandé quel était cet
animal inhabituel? Et bien, c’est un écureuil de Corée, de son vrai
nom tamia de Sibérie. Cette bestiole mignonne comme tout, est en train
d’envahir les forêts européennes. Et là, ça tique
: le tamia véhicule des centaines de parasites, et les maladies
humaines qui vont avec…
Dans une récente conférence organisée par Natureparif,
l’agence régionale pour la nature et la biodiversité en Ile-de-France,
Jean-Louis Chapuis, chercheur du Muséum
d’histoire naturelle, a présenté les résultats de ses études. Le
Tamia de Sibérie ou écureuil de Corée, un NAC (nouvel animal de
compagnie) introduit en France via les animaleries, est déjà
présent dans plusieurs forêts d’Europe. 25 populations sont
répertoriés en Europe dont 11 en France, notamment à Ermenonville,
Sénart, Verneuil-sur-Seine, Versailles, au parc Henri Sellier,
Vallée aux Loups…
Et alors
direz-vous, ils sont mignons et s’ils se multiplient à l’heure où tant
d’espèces sont menacées, c’est tant mieux. Pas si
simple, d’abord on ne sait pas quel impact aura sa présence sur
notre beau rouquin. Ce que l’on sait, c’est que l’introduction de
l’écureuil gris en Grande-Bretagne fait que, outre-manche, il ne
reste quasiment plus d’écureuil roux. Mais de plus, le tamia,
véhicule des maladies transmissibles à l’homme. Des études sont en cours
pour connaître l’ampleur de cet impact sanitaire et sa
vitesse de propagation.
Ce qui est d’ores et déjà certain, c’est que l’écureuil de Corée est couvert de tiques. Un seul tamia de Sibérie peut en porter
plus de 500 ! Les tiques véhiculent une maladie peu connue mais de plus en plus répandue : la maladie de Lyme ou borréliose .
Là où les tamias se sont installés, et où il y a des grands ongulés
(cerfs, chevreuils), il y a une forte possibilité de propagation de
l’infection. Plus d’un tamia sur deux est porteur de la maladie. La
recrudescence de la borréliose de Lyme est liée à la
prolifération des tamias. Bon pas de panique si vous vous promenez
dans les bois, la maladie de Lyme prise au début se soigne parfaitement
bien et, tout le monde ne se fait pas piqué par une
tique infestée! Soyez simplement vigilant si une dizaine de jours
après une balade en forêt, vous êtes grippé surtout en été, consultez.
C’est, en effet, un des symptômes de la maladie.
De fait,
avec le tamia, nous sommes confrontés à deux problèmes très
contemporains, la mode des NAC, totalement inepte - sauvages,
ils sont, sauvages, ils restent - et l’introduction dans la nature
d’espèces étrangères qui peuvent facilement devenir invasives, c’est à
dire, qu’elles prennent la place d’espèces locales.
Quelques exemples: le ragondin, la tortue de Floride, la coccinelle
asiatique et côté plantes, entre autres, la jacinthe d’eau.
Actuellement, selon des informations très précises, un nouvel
écureuil, l’écureuil du Japon, Sciurus lis, très ressemblant à notre écureuil roux, serait prêt à être mis sur le
marché. Alors, double vigilance.
De fait,
lorsque l’on rentre dans une animalerie, on ne voit que des petites
bêtes craquantes et tout nous pousse à les acheter pour les
dorloter. L’être humain est ainsi fait : profondément « maternant ».
Dès que nous voyons un petit animal mignon, nous avons envie de le
nourrir et de le câliner. Et le commerce en profite. Mais
la plupart de ces espèces ne sont pas des animaux de compagnie.
Comme les furets, les écureuils de Sibérie n’aiment pas être manipulés
et mordent facilement. Les enfants à qui on les a offerts se
lassent, et bien souvent on relâche la bestiole en forêt. Alors, si
par méconnaissance, vous avez acquis un NAC et que vous n’en pouvez-plus
de ce sauvage, renseignez-vous - en tapant le nom de
l’espèce sur Google, vous trouvez le plus souvent les coordonnées de
ces structures d’accueil - avant de l’abandonner n’importe où. Mais
évidemment, le mieux serait tout simplement de supprimer
le commerce des NAC!
A lire:
Faut-il avoir peur des introductions d’espèces? par Christian Lévêque. Les petites Pommes du savoir, Ed. Le Pommier, 4,60 €
Faut-il avoir peur des introductions d’espèces? par Christian Lévêque. Les petites Pommes du savoir, Ed. Le Pommier, 4,60 €