Figaro Santé 21 mars 2016
La tique porteuse de nombreuses mauvaises bactéries
JEAN-LUC NOTHIAS
INFECTIOLOGIE La tique, cet acarien parasite, peut provoquer de
nombreuses pathologies chez les animaux et les humains, dont la maladie
de Lyme. Celle-ci est causée essentiellement par une espèce de bactérie,
les borrelia (Borrelia garinii et Borrelia afzelii). Une équipe de
l’Inra vient de lever le voile sur un aspect méconnu de l’acarien,
l’identification des autres bactéries pathogènes
dont il peut être porteur et leur éventuelle action sur les maladies
transmises (travaux publiés dans PLOS Neglected Tropical Disease).
Les chercheurs du laboratoire Inra de Maisons-Alfort, aidés par leurs
collègues d’autres stations, ont étudié des tiques présentes dans les
Ardennes françaises. Près de 267 spécimens femelles d’Ixodes ricinus ont
été collectés entre mai et août 2012 sur 80 km dans 6 zones forestières
et 3 de bocages avec beaucoup de haies. Le genre ixodes est le plus
répandu (670 espèces connues) et Ixodes ricinus est la tique la plus
commune en Europe. On sait qu’elle peut transmettre, lors de son repas
de sang humain, des bactéries, des virus ou d’autres parasites. Mais
quelles bactéries ?
Les scientifiques ont donc testé les acariens
pour 37 pathogènes (bactéries et parasites), pour le virus de
l’encéphalite à tique TBV et pour 4 espèces de bactéries symbiotiques de
la tique (qui vivent en symbiose avec elle). Près de 45 % des spécimens
analysés étaient porteurs d’au moins un des pathogènes recherchés.
Parmi ceux ceux-ci, 45 % (54 tiques) étaient porteurs d’au moins deux
pathogènes ou plus. En prenant en compte les bactéries symbiotiques,
certaines tiques étaient porteuses de 8 micro-organismes différents.
Résultat, la co-infection de la tique, c’est-à-dire la présence d’au
moins deux pathogènes, est plutôt la règle que l’exception. D’où, sans
doute, les réactions différentes des personnes infectées.
« Ce
phénomène de co-infection massive a d’importantes implications pour la
santé humaine et animale , souligne le Dr Vayssier-Taussat, responsable
de l’étude. Cela révèle la nécessité de tenir compte de ces interactions
microbiennes dans le développement de nouvelles stratégies alternatives
pour contrôler les tiques et les maladies qu’elles véhiculent. »
JEAN-LUC NOTHIAS