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Lyme : la SPILF vent debout contre les recommandations de la HAS
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Lyme : la SPILF vent debout contre les recommandations de la HAS
Aude Lecrubier
AUTEURS ET DÉCLARATIONS 22 juin 2018
Paris, France — La rupture est consommée entre une bonne partie des infectiologues et la Haute Autorité de Santé (HAS). La Société Française de Pathologie Infectieuse de Langue Française (SPILF) a fait savoir par voie de presse qu’elle ne validait pas les nouvelles recommandations de la HAS sur la borréliose de Lyme et autres maladies vectorielles à tiques (voir Nouvelles recommandations Lyme de la HAS : quoi de neuf ?)[1].
Pour rappel, la HAS a co-piloté l’élaboration des recommandations avec la SPILF dans le cadre des actions prévues par le plan national de lutte contre la maladie de Lyme et les maladies transmissibles par les tiques de 2016 (PNDS).
Manque de clarté et ambiguïté
Seulement voilà, après la lecture de la première version proposée par la HAS, la SPILF, onze autres sociétés savantes et le Centre National de Référence des Borrelia impliqués dans la prise en charge des patients ont considéré que le texte du PNDS ne répondait pas aux objectifs fixés et l’ont fait savoir, dans un courrier adressé à la présidente de la HAS.
Pour la SPILF[2], au final, le texte de la HAS souffre « globalement d’un manque de clarté, ouvrant la porte à des dérives médicales pouvant être délétères pour les patients ». En outre, elle juge que la démarche diagnostique n’est « pas assez explicite ». Elle ajoute notamment que « le diagnostic microbiologique est la pierre angulaire d’une prise en charge optimale des patients » et qu’« il ne peut persister d’ambiguïté sur ce point ».
Or, dans la partie des recommandations concernant le diagnostic, les tests sérologiques occupent une place secondaire par rapport à l’examen clinique. Les tests sanguins ne sont considérés que « comme des outils d’aide au diagnostic pour les formes disséminées de la borréliose de Lyme ». « Ils ne suffisent pas à eux seuls à affirmer ou infirmer le diagnostic ».
Prolonger l’antibiothérapie au-delà de 28 jours : pas d’accord
Enfin, la SPILF ne reconnait pas, non plus, la nouvelle entité de « symptomatologie/syndrome persistant(e) polymorphe après une possible piqûre de tique » (SPPT) décrite dans les recommandations (voir Nouvelles recommandations Lyme de la HAS : quoi de neuf ?). Pour la SPILF, « cet ensemble de symptômes mal défini, n’existe pas dans la littérature médicale internationale et pourrait conduire à des excès de diagnostics susceptibles d’orienter les patients vers des prises en charge inadéquates ».
En réponse, sur ce point, la Fédération Française contre les maladies vectorielles à tiques (FFMVT)[3] a rappelé que le SPPT était une entité déjà mentionnée dans le rapport du HCSP de 2014 « borréliose de Lyme ». « Dans le cadre de ce groupe de travail, il était bien précisé que certains agents pathogènes identifiés ou non, tels que les bartonelloses, pouvaient être responsables de ce syndrome », explique l’association.
Enfin, la SPILF est en désaccord avec la recommandation donnant la possibilité de prolonger l’antibiothérapie au-delà de 28 jours. La texte de la HAS indique que si un prolongement est jugé nécessaire, il doit « être documenté dans le cadre de protocoles de recherche (observationnel, clinique, etc.) définis au sein du centre spécialisé, car ses effets secondaires doivent être surveillés et le risque d’antibiorésistance pris en compte. Il s’agit également de collecter des données scientifiques encore manquantes aujourd’hui ».
Mais, pour la société savante, il n’y a pas de débat : « l’intérêt d’un traitement au-delà de 28 jours n’est pas démontré » et « lorsqu’un traitement d’épreuve est indiqué il doit être unique ».
Consensus ou pas consensus ?
De son côté, la HAS a affirmé, lors de la conférence de presse de présentation des nouvelles recommandations, qu’un consensus avait été obtenu avec tous les participants du groupe de travail et notamment la SPILF en mars dernier.
Pour le Pr Dominique Le Guludec (présidente de la HAS), le texte se devait d’être publié « par respect pour 18 mois de travail de tous les professionnels et patients » qui y ont participé.
« Après 18 mois de travail, dans une situation ou les patients ont besoin d’être pris en charge de façon cohérente (or, il y a des patients qui sont pris en charge de façon incohérente) et avec des professionnels qui ont besoin d’assoir leur pratique sur des recommandations, il me semble qu’à un moment il faut bien sortir le fruit de ce travail même imparfait », a-t-elle expliqué.
Elle a ajouté que « ces recommandations ont vocation à protéger les patients de trois risques : l’errance diagnostique, les charlatans et les antibiotiques à très long cours, totalement inutiles et extrêmement dangereux. »
La FFMVT a confirmé, de son côté, que les travaux s’étaient « achevés en mars 2018 avec une version du texte court du PNDS élaborée sur la base d’un consensus et un rapport d’élaboration comprenant un argumentaire où figurent les positions divergentes selon les deux approches de la prise en charge de la maladie ».
Ces recommandations ont vocation à protéger les patients de trois risques : l’errance diagnostique, les charlatans et les antibiotiques à très long cours, totalement inutiles et extrêmement dangereux Pr Dominique Le Guludec
Elle s’est déclarée surprise de la position prise, a posteriori, par la SPILF.
« De façon surprenante, la publication du PNDS a été retardée par une démarche secrète de la SPILF. Nous avons découvert cette lettre [de la SPILF] un mois après son envoi à la HAS, via une source médiatique, ainsi que l’intention de la SPILF de modifier de façon unilatérale le contenu du PNDS », précise la FFMVT.
De façon surprenante, la publication du PNDS a été retardée par une démarche secrète de la SPILF La FFMVT