les borrélies peuvent déjouer le dispositif immunitaire
On connaît toujours mal les interactions entre immunité et spirochètes, mais ces bactéries font preuve de surprenantes capacités à se jouer du dispositif immunitaire humain. Les patients semblent tous réagir différemment, avec une réponse immunitaire plus ou moindre, allant jusqu'à développer une immunité cellulaire sur-stimulée ou hyper-activée, provoquant une cascade auto-immune et des symptômes évoquant ceux de maladies auto-immunes.
Les borrélies (comme certains virus tels que ceux de la grippe et du Sida) peuvent rapidement muter et changer leur protéines de surface, gênant la production d'anticorps et par suite freinant leur détection et leur attaque par les dispositifs de défense de l'immunité.
Les borrélies sont peu présentes dans le sang et la lymphe (ou elles y sont vulnérables aux globules blancs et en disparaissent par conséquent rapidement).
Les foyers d'infection peuvent se déplacer temporellement dans le corps, d'un organe à l'autre,
Les borrélies peuvent aussi se protéger dans des kystes sphériques (et peut-être dans certains organes), échappant ainsi aux antibiotiques ainsi qu'aux globules blancs.
On a montré dans les années 2000 les capacités motrices exceptionnelles (et bidirectionnelles) des spirochètes et tout spécifiquement de certaines borrélies. Leur mode locomoteur et leur forme spiralée semble - dans certains milieux de l'organisme - les aider à aisément distancer les macrophages phagocytaires qui devraient normalement les détruire comme corps étranger. In vitro, les spirochètes se déplacent le mieux et le plus rapidement dans des «gels», qui sont les milieux qui inhibent la motilité de la majorité des autres bactéries.
En 2008, l'observation en temps réel en vidéomicroscopie à contraste de phase a montré [39] que Borrelia burgdorferi se déplace à une vitesse moyenne de 1636 micromètres par minute (moyenne pour 28 bactéries observées), avec une vitesse maximale de 2800 µm/mn chez 3 des bactéries observées, soit la vitesse la plus rapide enregistrée pour un spirochète, et de deux ordres de grandeur au-dessus de la vitesse d'un polynucléaires neutrophiles humain connu être la plus rapide de nos cellules mobiles.
Les spirochètes disposent de 2 séries de flagelles leur servant à se déplacer dans des directions opposées le long de leur axe (en avant ou en arrière). Au contraire des autres bactéries mobiles connues, il s'agit de flagelles internes (organites dites «endoflagelles» ou «flagelles périplasmiques»).
Ces flagelles baignent dans le milieu interne (periplasme) de la cellule bactérienne. Chaque flagelle est attaché par l'une de ses deux extrémités à l'une des extrémités de la cellule. Leur longueur change selon l'espèce de spirochète. Chez certaines espèces les flagelles (dont le nombre fluctue aussi selon l'espèce) se chevauchent au centre de la cellule. Les flagelles sont animés d'un mouvement rotatoire dans le milieu interne (espace périplasmique).
Ces flagelles internes sont particulièrement peu efficaces dans un liquide particulièrement fluide : À la manière d'un vers de terre dans l'eau, la bactérie doit y effectue des flexions et rotations qui lui font consommer énormément d'énergie. Elle n'y progresse qu'à une vitesse d'environ 4, 25 μm/s, ou 255 μm/min [40]. Cependant, à la manière du ver de terre dans un substrat qui lui oppose une résistance, les borrélias deviennent particulièrement mobiles lorsque le degré de «viscoélasticité» du milieu augmente ; la bactérie devient ainsi «très» rapide (jusqu'à ∼ 2000 μm/min) et bien mieux capable de se diriger dans un fluide plus visqueux identique au milieu extracellulaire de notre organisme (par exemple dans la méthylcellulose dont les propriétés de viscosité imitent celles de la matrice extracellulaire, de celles des différents acide hyaluronique qui composent nos humeurs vitreuses et de celles des lubrifiants articulaires dont synovie). La vitesse des Spirochètes observés dans de telles "gels" est directement liée à la viscoélasticité du milieu, plus qu'à sa teneur en nutriments. Ainsi a-t-on observé des spirochètes restant mobiles durant 3 h dans un tel milieu, malgré une teneur en nutriment de 100 fois inférieure à la norme retenue pour les milieux de culture [41], de même que sur les surfaces où elles sont soupçonnées d'être présentes [42] [43].
Le mécanisme expliquant la motilité semble aussi fluctuer selon les espèces de spirochètes. Le modèle mis au point pour les leptospiræ, qui reste convaincant pour certains spirochètes n'explique pas le mouvement de Borrelia burgdorferi qui «nage» différemment et particulièrement efficacement dans les gels. Ses mouvements ont été observés en microscopie, et leur comparaison avec ceux de mutants de la même bactérie, associée à des études moléculaires des protéines et gènes impliqués dans la mobilité devraient bientôt éclairer ce qui la différentie d'autres spirochète de ce point de vue. Ces études et les premières séquences génomiques disponibles montrent déjà que les filaments protéiques qui forment les flagelles internes des spirochètes comptent parmi les plus complexes des flagelles bactériens connus et qu'ils sont organisés et régulés par la plupart de gènes impliqués dans la motilité des spirochètes. Ces organismes semblent par conséquent avoir depuis longtemps co-évolué avec leurs hôtes. L'explosion récente des cas de maladie de Lyme ne s'explique certainement pas par une mutation rendant la bactéries plus adaptée, mais par d'autres facteurs environnementaux facilitant la pullulation des borrelia et/ou des tiques.
un même individu peut par conséquent développer la maladie plusieurs fois ; il n'est pas immunisé par une première guérison tandis que le dispositif immunitaire se montre capable de détecter la bactérie (taux de cytokines élevés).
Ces multiples capacités (vélocité, camouflage) expliquent aussi que les premiers tests de laboratoire soient assez fréquemment négatifs. Certains experts estiment même qu'on ne peut le plus souvent pas éradiquer les spirochètes d'un organisme, mais aider le dispositif immunitaire à les contrôler.
Ceci suggère aussi que ces borrélies diffusent en premier lieu autour de la piqure de tique non pas dans le sang ou la lymphe, mais en "nageant" dans la substance intercellulaire de la peau (plus visqueuse, et où les globules blancs auraient toujours plus de mal à les intercepter). Cette mobilité importante et les chemins empruntés par la bactérie pourrait expliquer la difficulté des organisme-hôte à se débarrasser de ce parasite. Inhiber la capacité de déplacement de la bactérie dans ce milieu pourrait par conséquent être une piste thérapeutique.
http://www.zoonose.wikibis.com/maladie_de_lyme.php